Focus sur les EPAGE
L'établissement public d’aménagement et de gestion de l’eau (EPAGE) est un syndicat mixte en charge de la maîtrise d’ouvrage locale à l’échelle du sous-bassin versant. Il assure la maîtrise d’ouvrage opérationnelle locale pour la gestion du milieu et la prévention des inondations.
ORISK : Quelles ont été les motivations du rassemblement à l'échelle du bassin ?
EPAGE Seille et Affluents (ESA) : La compétence GEMAPI était morcelée entre les syndicats de rivière et les EPCI-FP.
Conscients de l’importance de cette thématique, renforcée par les aléas climatiques de ces dernières années, les élus des EPCI-FP ont souhaité démarrer une réflexion pour une organisation GEMAPI mutualisée et cohérente afin de mieux prendre en compte les enjeux du bassin. L’objectif était également de faciliter l’accès aux financements de l’Agence de l’Eau pour les années à venir.
EPAGE du bassin du Loing (EBL) : Si les élus avaient indiqué dès 2015 leur volonté d’étendre à l’échelle du bassin les fusions des syndicats entamées de longue date, la crue historique de 2016 a servi de déclic.
Suite à cette inondation, le préfet coordonateur de bassin Seine-Normandie a commandé une mission d’inspection au CGEDD, dont les deux recommandations principales ont été la structuration d’un EPAGE sur le bassin et l’engagement d’une démarche PAPI. Suivant ces recommandations, le préfet coordonateur de bassin a missioné un préfet hors-cadre fin 2017 pour mener à bien la structuration en forme d’EPAGE.
EPAGE Haut Doubs Haute Loue (EHDHL) : La Commission Locale de l'Eau (CLE, instance de concertation) du SAGE constituait un lieu d’échange à l’échelle du bassin versant entre le syndicat mixte de la Loue et le Syndicat mixte des milieux aquatiques du Haut Doubs.
Suites aux épisodes de fortes mortalités piscicoles connues sur la Loue en 2009/2010, l’une des actions fortes proposées dans le rapport du CGEDD missionné par la ministre de l’écologie de l’époque était la création d’un EPAGE pour disposer d’une structure reconnue disposant de moyens humains adaptés.
La construction du syndicat mixte unique, proposée en 2015 par le Département, a fait l’objet d’un pilotage politique fort par le président de la CLE (vice-président du Département, président du Syndicat Mixte des Milieux Aquatiques du Haut-Doubs (SMMAHD), en collaboration avec le président du Syndicat Mixte Loue. La Loi MAPTAM est venue renforcer la démarche par la création de la compétence GEMAPI et des EPAGE.
Quels items avez-vous repris ?
ESA : Les statuts provisoires comprennent à ce jour les 4 items obligatoires de la compétence GEMAPI. La réflexion se poursuit sur les items optionnels et notamment l’item 10° permettant de poursuivre la gestion et l’entretien des ouvrages hydrauliques.
EBL : L’EPAGE exerce les 4 items obligatoires (1, 2, 5, 8) transférés par les EPCI-FP. Par ailleurs, l’appui technique (assistance à maîtrise d’ouvrage des communes et EPCI-FP pour le ruissellement en milieu rural notamment), l’animation et la maîtrise d’ouvrage, la planification à l’échelle du BV sont inscrits dans les statuts sans pour autant exercer l’item 12. L’EPAGE assure enfin les études de nappes, de relation nappe/rivière ainsi que la mise en place et l’entretien des stations de mesure.
EHDHL : Il y a eu une volonté politique affichée de créer une structure de gestion du grand cycle de l’eau pouvant traiter l’ensemble des problématiques du bassin, y compris la gestion de la biodiversité associée.
Les 4 items de la GEMAPI sont exercés ainsi que la lutte contre la pollution, la mise en place et l'exploitation de dispositifs de surveillance de la ressource en eau et des milieux aquatiques, l’exploitation, entretien et aménagement des ouvrages hydrauliques propriétés de l’EPAGE, la valorisation touristique des milieux aquatiques, l'animation et la concertation dans les domaines des inondations, de la ressource en eau et des milieux aquatiques, l’élaboration, l’animation, la coordination et la mise en œuvre des documents d’objectifs de sites Natura 2000.
Quel a été l’impact de la prise de compétence sur l'organisation et le dimensionnement des services ?
ESA: Pour la projection des moyens humains au sein du futur EPAGE, nous nous sommes donc basés sur l’addition du temps passé par les syndicats de rivière et les EPCI-FP sur les thématiques GEMAPI ainsi que sur les postes déployés sur la Seille par l’EPTB lors des précédents contrats de rivière. Au total 4 ETP ont été estimés pour le fonctionnement de l’EPAGE en comptant la partie administrative.
EBL: L’ensemble du personnel technique et administratif des anciens syndicats a été repris. Deux chargés de mission ont été recrutés pour compléter le dispositif sur la gestion des milieux aquatiques. La structure compte -en plus du directeur- un pôle technique de 7 chargés de missions milieux aquatiques, une chargée de mission inondation/zone humide et un pôle administratif de 3 personnes.
EHDHL : Les deux sites géographiques d’implantation des services ont été conservés vu la taille du territoire. Les agents ont globalement conservé leurs missions mais avec un élargissement territorial d’intervention
Les effectifs ont un peu augmenté :
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0.5 ETP supplémentaires pour la direction,
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0.5 ETP pour le secrétariat/comptabilité
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2 postes de chargés de mission ont été créés pour l’animation du SAGE et l’élaboration d’un contrat de bassin
Le volet prévention des inondations n’était pas vraiment assuré par les anciens syndicats: il est envisagé la création d’un poste en 2022.
Quels sont les travaux prioritaires de l’EPAGE ?
ESA: Les travaux prioritaires de l’EPAGE seront les travaux de restauration des milieux aquatiques (reméandrement, restauration de la continuité écologique…) ainsi que la meilleure gestion du risque inondation.
Les ouvrages hydrauliques du bassin (vannages et clapets) sont gérés par les syndicats de rivière jusqu’à ce que l’EPAGE révise ses statuts en 2022 afin d’inclure l’item optionnel correspondant à leur gestion.
EBL: Les travaux prioritaires sont la déclinaison du Contrat Territorial Eau et Climat (CTEC) et du PAPI.
Le CTEC 2020-2024 affiche un programme de 20M€ sur la GEMA :
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15M€ dédiés à la continuité et la restauration hydromorphologique des cours d’eau
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5M€ affectés aux actions sur les zones humides (1M€), l’acquisition et la connaissance (1,4M€), l’entretien (1M€), la sensibilisation (150k€) et l’animation (2M€)
Le programme d’études préalable au PAPI du Loing compte 39 actions pour un coût total est de 2,2M€. L’EPAGE assure la maîtrise d’ouvrage de 8 d’entre elles. L’animation est assurée par l’EPTB Seine Grands Lacs sur l’incitation du préfet; à l’issue du programme d’étude préalable, l’animation du PAPI complet sera reprise par l’EPAGE.
EHDHL: L’EPAGE réalise essentiellement des travaux de restauration des milieux aquatiques (zones humides, tourbières et cours d’eau).
Quelques actions sont liées à la compétence PI :
En tant qu’animateur Natura 2000, l’EPAGE assure également la maîtrise d’ouvrage d’action de restauration et gestion de milieux naturels et de l’assistance à maîtrise d’ouvrage pour les porteurs de contrats (communes, associations, privés).
L’EPAGE dispose de moyens humains et techniques associés à ces missions (matériel agricole adapté aux milieux humides, gestion d’un troupeau de chevaux).
Partage d'expérience
Appel à contribution : avez-vous des besoins identifiés pour la suite des travaux ?
ESA: Des informations concernant la gestion des petits ouvrages hydrauliques, des retours d’expérience sur les items optionnels ainsi la gestion du risque inondation et ouvrages de protection sont les bienvenues.
EBL : Nous aurions des besoins pour assurer l’assistance à maîtrise d'ouvrage (AMO) sur la partie érosion ruissellement, pour mettre en œuvre les missions du décret digues, et sur la préservation et restauration des zones d'expansion des crues et zones humides.
EHDHL: La mise en commun de documents de type CCTP pour des études sur le volet hydraulique (cours d’eau ruissellement…) serait effectivement intéressante.
Respectivement, sur quels domaines pouvez-vous appuyer le réseau régional ?
ESA: Nous pouvons apporter notre expérience sur la conduite d’une étude GEMAPI pour la mise en place d’une structure de bassin.
EBL : Nous pouvons échanger avec les collectivités demandeuses sur le fonctionnement en comité de bassins, de notre stratégie d’acquisition de zones humides en fond de vallée, la gestion et restauration de cours d’eau (y compris en maîtrise d’oeuvre) et le fonctionnement du PAPI en multi-acteurs.
EHDHL: Comme indiqué précédemment le volet PI n’est pas la mission la plus importante de l’EPAGE.
Nous sommes cependant en train de remettre à niveau nos ouvrages hydrauliques et avons donc potentiellement des CCTP récents à partager (mise en place de télésurveillance et webcam, changements des systèmes hydrauliques de manœuvre, Visites Techniques Approfondies).
Sur le volet GEMA nous avons par contre de nombreux documents à transmettre (CCTP études et travaux, DLE, DIG etc…).
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Focus sur les EPTB
L’établissement public territorial de bassin (EPTB) est un syndicat mixte établi à l’échelle d’un bassin ou d’un groupement de sous-bassins hydrographiques qui a pour mission de faciliter la prévention des inondations la gestion équilibrée de la ressource en eau, ainsi que la préservation et la gestion des zones humides. Il a notamment pour rôle d’apporter à ses membres l’appui technique nécessaire pour la réalisation des missions relevant de la GEMAPI et d’assurer la cohérence de l’activité de maîtrise d’ouvrage des EPAGE
ORISK : Quelle différence le label « EPTB » apporte-t-il par rapport à un EPAGE ou un Syndicat Mixte de Bassin ?
Cédric BORGET : Le label EPTB apporte surtout de la légitimité : l’EPTB Saône et Doubs, de par son label, est un acteur incontournable sur son territoire. Par exemple, il est sollicité pour avis pour le PGRI ou le SDAGE, et il est consulté sur les projets d’un certain montant impactant le cycle de l’eau sur son territoire et portés par d’autres acteurs.
De plus, le label EPTB permet de bénéficier de certains outils administratifs que n’ont pas les simples syndicats mixtes de bassin, comme la délégation de la GEMAPI par les EPCI.
Enfin, le label EPTB permet de porter un Projet d’Aménagement d’Intérêt Commun (PAIC), ce qui lui permet d’intervenir en-dehors du périmètre de ses membres. Par exemple, dans ce cadre, l’EPTB Saône et Doubs pourrait porter des travaux sur la Saône, même sur le territoire de collectivités non-adhérentes.
Note d'ORISK : Un PAIC est porté par l'EPTB Loire pour les ouvrages de protection sur l’ensemble du bassin fluvial - Plus d'information sur leur site
Comment l’EPTB exerce-t-il ses compétences de coordination de bassin versant sur son territoire ? Comment cette mission se met-elle en œuvre avec les collectivités GEMAPIennes ?
CB : Les missions de coordination sont confiées à l’EPTB Saône et Doubs par la loi à travers le Code de l’Environnement (L213-12, L566-10, R213-49). Celles-ci concernent surtout la coordination des syndicats de bassin versant, étant donné que ce sont eux qui exercent principalement la GEMAPI sur le territoire.
Concrètement, l’EPTB Saône et Doubs exerce cette mission de 3 façons :
- la première est la mise en réseau des personnels des syndicats de bassin versant via le Réseau des Gestionnaires de Milieux Aquatiques (RGMA, présentation et site);
- la deuxième, plus informelle, est une mise en réseau politique et stratégique via les échanges entre élus et responsables de structures. Celui-ci vise à bien articuler les missions et à accorder les discours des différentes structures du bassin versant de la Saône et du Doubs envers les partenaires institutionnels et financiers comme l’Agence de l’Eau ou l’Etat.
- la dernière est plutôt technique : l’avis de l’EPTB est sollicité sur tout projet porté par un EPAGE et soumis à autorisation (III de l'article R213-49 du code de l'Environnement), pour tous les projets d’aménagement de bassin, d’entretien de cours d’eau et de défense contre les inondations dépassant 1,9M€ (R214-92 du code de l'Environnement), lors de l’élaboration des SAGE (L212-3 du code de l'Environnement), ainsi qu’en tant que Personne Publique Associée, aux projets de PAPI, SCOT, PLUI, Schémas Directeurs d’Assainissement, … Il apporte ainsi une vision d’ensemble et d’intégration à ces projets.
L’EPTB Saône et Doubs a-t-il des compétences hors-GEMAPI ?
CB : L’EPTB Saône et Doubs exerce bien des compétences hors-GEMAPI, notamment pour le compte de ses adhérents « non-GEMAPIens » (Départements et Régions). Dans le cadre de ses futurs statuts, elles consistent en l’animation d’observatoires, les missions de coordination, le portage d’études générales, l’animation des politiques publiques (Contrats de Rivière, SAGE, PAPI, Natura 2000).
Le besoin le plus important pour les adhérents est l’animation des politiques publiques, car c’est ce qui ouvre la porte aux subventions pour leurs projets. Toutefois, le besoin exprimé par la majorité de nos adhérents (surtout les Communautés de Communes, aujourd’hui majoritaires) est la réalisation d’opérations concrètes sur les axes Saône-et-Doubs, liées à la GEMAPI.
Concernant la culture du risque, l’outil principal de l’EPTB Saône et Doubs est l’ORISK : c’est à la fois son support de travail et de communication.
De plus, via les PAPI, l’EPTB Saône et Doubs porte systématiquement les actions de sensibilisation et de culture du risque, comme la pose de repères de crue, l’animation pour les scolaires, des circuits découverte, les opérations fil bleu, l’assistance aux communes à la réalisation de PCS et de DICRIM…
Nous aimerions aussi développer les formations destinées aux élus, telles que celles organisées en juin 2015 dans le cadre du PAPI de Besançon. Enfin, l’EPTB Saône et Doubs attache beaucoup d’importance à la mise en valeur de données historiques via l’ORISK ; nous le considérons comme une base aux politiques de prévention.
Quelle est la place du SAGE dans la mise en œuvre de la GEMAPI ?
Hélène LAMBERT : Un SAGE est une démarche visant à instaurer une gestion équilibrée de l’eau et des milieux aquatiques à l’échelle d’un bassin versant. Il fixe des orientations et des objectifs pour répondre aux enjeux spécifiques au territoire, et soutenir l’objectif de reconquête du bon état des eaux visé par la Directive Cadre Européenne sur l’eau (DCE) de 2000.
Un SAGE peut ainsi mettre l’accent sur la préservation ou la restauration des milieux aquatiques et leurs annexes, ou, comme c’est le cas sur l’Allan, sur la prévention et la gestion du risque d’inondation.
Les deux axes GEMA et PI peuvent d’ailleurs être étroitement liés, la restauration de la dynamique d’un cours d’eau ou de zones d’expansion des crues pouvant contribuer à un objectif de réduction de l’aléa à l’aval de la zone restaurée.
Les orientations proposées par le SAGE sont ensuite déclinées par chaque autorité en charge de la GEMAPI ; l’instance de concertation du SAGE, la Commission Locale de l’Eau (CLE) veillant à la bonne cohérence des projets portés par les différents opérateurs.
Le SAGE Allan/Savoureuse prévoit-il des actions hors-GEMAPI? Comment cela s’articule-t-il avec les collectivités GEMAPIennes ?
HL : Le SAGE Allan, approuvé en 2019, identifie cinq enjeux majeurs :
- la gouvernance et l’organisation des compétences,
- la gestion quantitative,
- la qualité de l’eau,
- la prévention et la gestion du risque inondation
- la restauration des milieux.
La compétence GEMAPI relève essentiellement de ces deux derniers enjeux.
Plus spécifiquement sur l’enjeu inondation, outre la réduction de la vulnérabilité, les dispositions du SAGE incitent entre autres à une meilleure préparation à la survenance d’un événement. Il s’agit par exemple de s’assurer que les communes, entreprises ou autres établissements vulnérables aux inondations disposent de procédures leur permettant de s’organiser pendant la crise, et de gérer la reprise de l’activité. Le SAGE recommande également d’entretenir la culture du risque via des informations à la population et aux entreprises. La mémoire des événements passés est notamment gardée par la pose de repères de crues.
La mise en œuvre du SAGE Allan s’appuie sur deux dispositifs contractuels : un contrat de bassin (en cours d’élaboration) et un PAPI (en réflexion). Tous deux permettent aux maîtres d’ouvrage de bénéficier de financements privilégiés.
La Commission Locale de l’Eau (CLE) joue un rôle essentiel, c’est le moteur du SAGE : elle mène les réflexions, conduit les débats et oriente les décisions. La CLE est constituée de représentants des usagers, des services de l’Etat et d’élus locaux, ces derniers tenant une place prépondérante. La composition de la CLE du SAGE Allan a été récemment renouvelée, afin que les collectivités GEMAPIennes du bassin y soient toutes représentées.
Pour aller plus loin :
L'interview intégrale des EPAGE, intégrant les questions relatives aux instances de gouvernance, à la taxe GEMAPI, aux outils fonciers mobilisés est à retrouver sur ORISK
Ressources sur la GEMAPI et en particulier sur les systèmes d'endiguement sur la page ORISK dédiée dont les éléments relatifs aux systèmes d'endiguement
Les EPAGE interrogés :
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